
Vous exploitez une entreprise de manière individuelle. Vous souhaitez la vendre ? Quelles seront vos démarches et les conséquences de cette cession ?
Définition et principes de la cession de l'entreprise individuelle
Une entreprise individuelle est celle exploitée de manière indépendante, en dehors de la présence d'autres personnes associées. En droit français, elle se traduit par ce que l'on appelle une exploitation en « nom propre », par la constitution d'un fonds de commerce ou d'un fonds artisanal. L'exploitant ne crée pas de société nouvelle pour exercer son activité : il n'y a pas naissance d'une personne morale différente. Il exploite directement lui-même son fonds.
À côté de ces « fonds » de commerce et artisanaux, l'on peut également considérer que les micro-entrepreneurs exploitent une entreprise individuelle. Au regard du chiffre d'affaires limité de ce statut, les activités sont souvent difficilement cessibles en « globalité », d'autant plus qu'elles sont liées à la personnalité et aux compétences propres de l'entrepreneur.
Bon à savoir : la plateforme Marketplace Infogreffe a pour objectif de faciliter la transmission d’entreprises entre cédants et repreneurs grâce à un moteur de recherche. Marketplace Infogreffe répertorie des offres de cession et facilite les échanges entre les parties : cédants, repreneurs, investisseurs.
Démarches et procédure
Tout dépend de la forme sous laquelle l'activité est exploitée.
Cession d'un fonds de commerce
Si l'on prend l'exemple de la vente d'un fonds du commerce, voici les principales démarches à accomplir :
- Tout d'abord, la cession implique la mise en vente ou l'information transmise de la volonté de céder son activité par l'entrepreneur. Celle-ci passe, selon les secteurs, par différents interlocuteurs privilégiés (réseau de fournisseurs, agents immobiliers spécialisés dans la vente de fonds de commerce, etc.) ;
Bon à savoir : l'ensemble des éléments du fonds (droit au bail, enseigne, clientèle, etc.) sont cédés ensemble, le fonds étant une « universalité ».
À noter : le vendeur d’un fonds de commerce est dans l’obligation d’informer l’acheteur des limites imposées par la copropriété qui régit les locaux au sein desquels le fonds est exploité. Ces limites peuvent notamment concerner l'interdiction d'exploiter le fonds après certains horaires. Le fait de cacher cette information peut entraîner la nullité de la cession du fonds de commerce (Cass. com., 6 janvier 2021, n° 18-25.098).
- Une fois le repreneur trouvé et l'accord sur le prix de vente entendu, il convient de réaliser un acte de vente par écrit, pas nécessairement notarié.
À noter : s'il y a signature d'une promesse unilatérale de vente, celle-ci doit obligatoirement être notariée ou enregistrée au service des impôts, sous peine de nullité. Si, ultérieurement à la signature de cette promesse, les parties décident de modifier le prix de vente, il convient de rédiger un avenant qui doit, lui aussi, être notarié ou enregistré, sous peine de nullité (Cass. com., 16 octobre 2019, n° 18-14.678).
- Cet acte doit être enregistré auprès de l'administration fiscale. Une publication sur un support habilité à recevoir des annonces légales (publication de presse ou service de presse en ligne) doit également être effectuée afin de respecter le droit à l'information des créanciers.
La publication doit mentionner les informations suivantes :
- si l’acte n’est pas authentique, la date, le volume et le numéro de la perception auprès de laquelle l’acte est enregistré ;
- la date de l’acte ;
- le nom, prénom et domicile des anciens et nouveaux propriétaires s’il s’agit de personnes physiques, leur dénomination ou leur raison sociale s’il s’agit de personnes morales ;
- la nature et le siège du fonds ;
- le prix stipulé, y compris les charges ou l'évaluation ayant servi de base à la perception des droits d'enregistrement ;
- le délai d’opposition des créanciers ;
- l'élection de domicile dans le ressort du tribunal.
La publicité dans les annonces légales doit intervenir dans les 15 jours de la date de l’acte de cession (décret n° 2020-106 du 10 février 2020).
Bon à savoir : en abrogeant l’article L. 141-1 du Code de commerce, la loi n° 2019- 744 du 19 juillet 2019 de simplification du droit des sociétés a supprimé les mentions légales obligatoires devant être portées sur l'acte de cession d'un fonds de commerce.
À noter : l'ensemble de ces démarches peut prendre plusieurs mois. La négociation est souvent difficile et la rédaction du contrat de vente est ardue. Il est fortement conseillé de recourir aux services d'un avocat spécialiste en ce domaine.
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Cession d'un fonds artisanal
Dans un autre registre, l'on peut également céder son fonds artisanal. Une telle activité peut être, depuis la loi n° 96-603 du 5 juillet 1996, constituée sous la forme d'un fonds « artisanal » suivant le modèle prévu pour le fonds de commerce. Toutefois, la où le fonds de commerce ne peut être que cédé en intégralité, le fonds artisanal est soumis au régime de droit commun du Code civil. Ainsi, il est possible, pour l'artisan, de céder les éléments composant ce fonds artisanal ensemble ou séparément.
Bon à savoir : généralement, hors cadre du fonds de commerce, la cession de l'entreprise individuelle se fera librement, élément par élément (outillage, marchandises) ou globalement mais sans application d'un régime spécifique (les règles de la vente prévues par le Code civil s'appliquent).
Cession d'une clientèle civile
Un autre cas spécifique doit être mentionné : celui de la cession de la clientèle civile pour les professions libérales, notamment médicales, désormais autorisée.
Effets et fiscalité de la cession de l'entreprise individuelle
L'exploitant doit procéder à une cessation d'activité auprès de l'INPI sur le site internet formalites.entreprises.gouv.fr. Ce site propose un formulaire en ligne adapté. Il indique les informations et pièces justificatives à fournir.
Sur le plan fiscal, la cessation d'activité entraîne l'imposition immédiate de plusieurs éléments : les bénéfices ou recettes réalisées depuis le dernier exercice, les bénéfices en sursis d'imposition et surtout les plus-values réalisées sur la vente des immobilisations. Les résultats sont imposés d'après le régime du bénéfice réel normal ou simplifié selon le choix préalable du cédant de l'entreprise. La déclaration doit être télétransmise suivant un délai de 60 jours à compter de la cessation d'activité. Elle entraîne le paiement de la TVA pour ceux qui y étaient soumis, dans un délai de 30 à 60 jours, selon le régime choisi.
Il existe un régime spécial qui permet l'exonération des plus-values réalisées lors de la cession d'une entreprise individuelle. Il est prévu par l'article 238 quindecies du Code général des impôts. Selon ce dispositif, les plus-values réalisées dans le cadre d'une activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale ou agricole à l'occasion de la transmission d'une entreprise individuelle sont exonérées soit en totalité, soit en partie selon les cas. L'activité doit avoir été exercée pendant au moins 5 ans.
Bon à savoir : on exclut de cette exonération la plus-value réalisée du fait de la cession des biens immobiliers.
À noter : une personne mineure n'est pas considérée comme un exploitant au regard du régime d'exonération des petites entreprises. Les périodes pendant lesquelles elle a exercé son activité en cette qualité ne sont donc pas retenues dans le décompte du délai de 5 ans d'exercice à titre professionnel de l'activité (CE, 24 juillet 2019, n° 414352).
Pour bénéficier de l'exonération totale, les éléments de l'entreprise individuelle ne doivent pas être évalués à plus de 300 000 € hors taxes. Une exonération partielle demeure possible dès lors que la valeur des biens cédés est comprise entre 300 000 et 500 000 €.
Le dispositif est complexe. Il est exclusif d'autres régimes comme celui prévu par l'article 41 du Code général des impôts permettant un report d'imposition des plus values. Il est également incompatible avec un autre avantage prévu par l'article 151 septies du même code. Cet article ouvre, entre autres, le bénéfice de l'exonération fiscale des plus values aux « autres activités ou titulaires de bénéfices non commerciaux ». La totalité de la plus-value peut être exonérée dès lors que le montant des recettes annuelles de l'entreprise cédée sont inférieures à 90 000 €. Il convient donc d'opter pour le bon régime auprès de l'administration fiscale, en fonction de la situation.
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